La révocation du Gérant est la décision par laquelle la société retire les pouvoirs du gérant en mettant fin à ses fonctions avant l’arrivée du terme.
La révocation du gérant de la société à responsabilité limitée
est une décision qui revêt une importance particulière vu l’importance de cette fonction dans ce type de société et la divergence des intérêts mis
en jeu par ladite décision.
Il y a d’abord l’intérêt de
la société qui est mis en jeu par la révocation puisque le bon fonctionnement de la personne morale exige une certaine continuité au niveau
de la direction. Ensuite, si le gérant, souvent
lui-même associé, doit disposer d’une certaine stabilité dans sa fonction, les
associés en revanche, ne doivent pas être contraints à maintenir un gérant qui ne donne pas
satisfaction. Enfin, les tiers ont intérêt à traiter en toute sécurité avec la
personne qui dispose régulièrement des pouvoirs pour lier la société…
Conformément à l’article 122 du code
des sociétés commerciales (C.S.C), le gérant d la S.AR.L peut être révoqué soit par décision des associés (I) soit, par
voie judiciaire (II). Dans les deux cas et pour assurer la sécurité des
transactions de la société, la révocation doit recevoir la publicité légale
requise(III)
I -La révocation par décision des associés
Le gérant peut être révoqué par décision des associés prise dans une
assemblée générale et il suffit que la majorité requise pour décider la
révocation soit atteinte et que l’assemblée de la société soit régulièrement
convoquée.
I-I : La majorité requise.
La majorité requise est différente
selon que l’on est devant un gérant statutaire ou un gérant nommé par acte
séparé. Dans le premier cas, le gérant est révocable par les associés représentant
les trois quarts du capital social. Lorsqu’il est nommé par acte séparé, il est
révocable par décision représentant uniquement la moitié des associés.
Contrairement au droit français, le
juste motif n’est pas exigé pour révoquer le gérant. Le statut du gérant en
droit tunisien demeure sur ce point imprégné par celui du mandataire en matière
civil lequel, peut être révoqué par le mandant sans aucun motif.
La différence au niveau de la majorité requise s’explique
par le fait que la révocation d’un gérant statutaire revient en définitive à une modification des statuts qui ne peut
avoir lieu que lorsque les voix représentant les trois quarts du capital sont réunies.
Le gérant prend part au vote s’il est
associé et de ce fait il ne craint jamais la révocation s’il est majoritaire
voire égalitaire.
I-II : La convocation de l’assemblée générale.
L’assemblée générale de la S.A.R.L
est en principe convoquée par le gérant. Or, il est difficile d’envisager en pratique qu’un
gérant convoque une assemblée pour décider sa propre révocation.
Lorsqu’il existe plusieurs gérants
dans la société, le problème peut ne pas avoir lieu. L’un des gérants peut
lorsqu’il est habilité à le faire, convoquer l’assemblée pour décider la
révocation du cogérant.
De même, lorsqu’une assemblée est
déjà convoquée, la révocation du gérant peut être soulevée par les associés
lors de l’assemblée en tant qu’incident de séance en abordant le dernier point
de l’ordre du jour …
Pour remédier à la situation de
blocage face à un gérant qui refuse de convoquer l’assemblée générale en vue de
maintenir son poste, l’article 127 alinéa 2 du code des sociétés
commerciales permet à Tout associé de demander au juge des référés d’ordonner
au gérant ou au commissaire aux comptes, s’il existe un, ou un mandataire
judiciaire qu’il aura désigné de convoquer l’assemblée générale et de fixer
l’ordre du jour…
Le recours au juge de référé permet
de contrecarrer la volonté du gérant d’éviter la tenue de l’assemblée qui aura
pour objet de voter sa révocation.
II - La révocation prononcée par le juge
L’intervention judiciaire en matière
de révocation présente une utilité indéniable puisque souvent c’est la seule
procédure qui permet la révocation d’un gérant majoritaire ou soutenu par la
majorité des associés.
Elle est réglementée par l’alinéa
dernier de l’article 122 du C.S.C selon lequel tout associé représentant le
quart du capital social aux moins peut intenter une action devant le tribunal
compétent tendant à obtenir la révocation du gérant pour cause légitime.
Pour avoir la qualité de demander la
révocation judiciaire, il suffit pour un seul associé de détenir le quart du
capital social. Cette alternative judiciaire présente donc une utilité
incontestable lorsque le gérant est majoritaire ou lorsqu’il bénéficie du soutien de la majorité.
Le tribunal compétent peut être le
juge de référé du siège social de la société lorsqu’il y a urgence.
L’existence d’une cause légitime est
dans ce cas exigée et il revient à l’associé ou les associés qui intentent l’action
de la prouver.
C’est ainsi que la cause légitime existe
toujours lorsqu’une faute de gestion intentionnelle est imputable au gérant tel
que le détournement de fonds sociaux ou l’empiètement sur les prérogatives des
associés.
Tout acte d’imprudence ou de mauvaise
gestion peut aussi être qualifié de cause légitime lorsqu’un préjudice est subi
par la société.
L’existence ou non de la cause
légitime obéit en définitive à l’appréciation souveraine du juge qui procède
d’une manière casuistique.
III : La publicité légale de la révocation
Dans un souci de sécurisation des
transactions, la révocation du gérant est soumise aux formalités de dépôt de
publicité conformément à l’article 16 du C.S.C qui énonce expressément l’acte
de cessation des fonctions des dirigeants des sociétés. La publicité implique
au préalable le dépôt légal de la décision.
Les formalités de dépôt et de publicité
requièrent une importance particulière à l’égard des tiers qui sont avisés du
fait que la personne morale n’est plus représentée par le gérant révoqué. En
pratique, c’est le gérant nouvellement désigné qui est responsable de
l’accomplissement de ces formalités.
Le dépôt de l’acte de cessation du
gérant qui est soit une délibération de l’assemblée soit, une décision
judiciaire de révocation, s’effectue au registre de commerce de la société
tenue au tribunal de première instance de son siège social.
La publicité de l’acte s’effectue par
une insertion au J.O.R.T Journal officiel de la République Tunisienne dans un
délai d’un mois à compter de l’inscription faite au registre de commerce.
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