samedi 27 octobre 2012

Le caractère d'ordre public des dispositions de l'article 23 sur les baux commerciaux

La loi n° 37 de 1977 réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux d’immeubles ou de locaux à usages commercial, industriel ou artisanal est une loi qui intéresse l’ordre public et qui vient protéger l’exploitation commerciale et le propriétaire du fonds de commerce par un ensemble règles.

Selon l’article 23 de cette loi : «  Le bail est résilié à défaut de paiement du loyer aux échéances convenues passé le délai de trois mois à partir de la date d’émission par voie d’huissier notaire d’un avis de paiement resté sans effet. L’avis doit à peine de nullité mentionner ce délai. Le délai sus-visé ne peut être prorogé et la résiliation est prononcée d’office ».

Selon un arrêt n° 64414 du 1/08/2011, la Cour de Cassation accepte le pourvoi du locataire et casse la décision de la juridiction de fond qui, en se basant sur les règles de droit commun et plus spécialement l’article 796 du Code des Obligations et des Contrats, donne suite positive au  recours du bailleur en résolution du bail pour faute de paiement des loyers.
Le préavis de l’article 23 de la loi de 1977 est pour la Cour de Cassation une procédure d’ordre public qui doit être soulevée d’office par les juridictions de fond.

L’approche de la Cour de Cassation qui est adoptée dans plusieurs autres arrêts ( Cassat.73069 du 17 Fev.2000) n’est cependant pas partagée par toutes les juridictions de fond qui continuent à accepter le recours fondé sur les règles de droit commun pour faute de paiement des loyers, notamment en référé pour obliger le locataire à quitter les lieux s’il ne s’acquitte pas du loyer.

De même,  plusieurs arrêts rendus la Cour de Cassation adoptent l’approche contraire en jugeant que le caractère d’ordre public de l’article 23 concerne exclusivement l’action pour résiliation du bail commercial visée par le texte de l'article 23. Le bailleur selon cette lecture, est en droit de se contenter de demander les loyers  sans être obligé à recourir à l’action de résiliation pour faute de paiement après le préavis de l’article 23.

Il est à noter que l’article 32 de la loi de 1977 sur les baux commerciaux insiste sur le caractère d’ordre public des dispositions de l’article 23 en stipulant que « Sont nuls et de nuls effets quelle qu’en soit la forme, les clauses les stipulations et  arrangements qui auraient pour effet de faire échec au droit de renouvellement institué par la présente loi et aux dispositions des articles 23 et 26 de la présente loi ».

Une action au sens de l’article 796 du C.O.C qui tend à la résolution du bail en faveur du bailleur pour non paiement du loyer a-t-elle pour effet de faire échec aux dispositions de l’article 23 qui sont d’ordre public ? 

La réponse positive s’imposerait surtout du point de vue du locataire qui devrait arguer du fait que son droit à un délai de trois mois de l’article 23 est atteint. 

Par contre, la réponse est différente si l’action fondée sur le droit commun, tend uniquement à obliger le locataire  de s’acquitter du  loyer échu. Cette action n’a pas pour objet la continuité de la relation contractuelle puisque le bailleur se contente  de demander l’exécution du contrat et on ne peut dans ce cas, lui avancer que son recours porte atteinte aux dispositions d’ordre public de l’article 23.

La question est beaucoup plus complexe en ce qui concerne les actions en référé tendant à obliger le locataire de quitter les lieux s’il ne paye pas le loyer. Ces actions largement acceptée par les juridictions de fond tendent en définitif, à mettre fin à la relation contractuelle puisque l’évacuation des lieux est le résultat du non paiement des loyers. Le locataire se trouve obligé d’évacuer les lieux s’il ne paye pas les loyers en cours de l’instance ou après le prononcé du jugement. Les loyers objet du jugement en référé peuvent toutefois concerner un ou deux mois seulement, alors que l’article 23 donne au locataire une grâce de trois mois avant l’exercice contre lui d’une action encore plus sévère qui est l’action en résiliation. 

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