L’opposition du
cogérant peut être définie comme étant la procédure par laquelle chaque
gérant peut contester l’opération projetée par son cogérant lorsqu’il juge que
ladite opération est contraire à l’intérêt de la société, à la loi ou aux
statuts.
Le Code des Sociétés Commerciales réglemente
l’opposition du gérant de la S.A.RL dans son article 114 qui dispose que :
« Dans ses rapports avec les tiers, la
société est engagée par tous les actes accomplis par le gérant et relevant de
l'objet social.
Les dispositions ci-dessus indiquées s'appliquent, en cas de
pluralité de gérants, aux actes accomplis par chacun deux. L'opposition formée
par un gérant aux actes d'un autre gérant est sans effet à l'égard des tiers, à
moins qu'il ne soit établi qu'ils en aient eu connaissance ».
Ce texte est
une reproduction de la solution de
l’article L 223-18 du code de commerce français : « En
cas de pluralité de gérants, ceux-ci détiennent séparément les pouvoirs prévus
au présent article. L'opposition formée par un gérant aux actes d'un autre
gérant est sans effet à l'égard des tiers, à moins qu'il ne soit établi qu'ils
en ont eu connaissance. ».
L’opposition du cogérant mérite d’être envisagée en
premier lieu sous l’angle de sa validité interne entre les gérants d’une part
et la société d’autre part (I) L’opposition mérite aussi d’être envisagée du
point de vue du tiers traitant avec la société( II)
I- La validité de l’opposition entre gérants et à l’égard de la société
Le législateur n’a prévu aucun mode formaliste pour
l’expression de cette opposition en ce sens qu’il n’y a pas de forme
particulière exigée pour la validité de l’opposition qui doit uniquement
refléter sans équivoque la volonté du gérant opposant.
L’absence d’’un mode formaliste particulier pour cette
procédure implique, que l’opposition obéit aux seuls impératifs de la preuve.
Elle peut être prouvée par tous moyens, notamment un exploit d’huissier, une
lettre recommandée, voire une déclaration devant témoin.
Toutefois, les statuts de la société peuvent prévoir
un mode particulier pour exprimer l’opposition de l’un des gérants qui doit
dans ce cas, respecter les dispositions statutaires pour que son opposition
puisse avoir un effet.
En outre, Le législateur ne semble pas donner une
valeur à la motivation de l’opposition. Il n’est nullement exigé que
l’opposition doit être motivée. Il suffit donc à un gérant de faire connaître
son opposition de façon certaine pour que l’acte soit remis en cause.
Le législateur ne donne aucun effet à la motivation de
l’opposition qui pourrait découler d’une cause légale comme le dépassement de
pouvoirs ou d’une simple appréciation de l’opportunité de l’acte de la part du
gérant opposant.
Par conséquent,
L’opposition produit ces effets quelque soit sa motivation et même si dans
certains cas elle peut s’avérer intempestive ou de mauvaise foi sous réserve du
fait que le gérant qui s’oppose peut être tenu responsable à l’égard de la
société et aussi du tiers pour l’annulation d’une opération sans motif
légitime.
II- La validité de l’opposition à l’égard des tiers
L’opposition est en principe sans effet à l’égard des
tiers en ce sens que ce dernier continue à traiter avec l’un des gérants tout
en sachant que l’acte projeté engage la société. Le tiers n’est pas censé
connaître l’existence de l’opposition ou même l’existence d’un cogérant ayant
des pouvoirs similaires à celui avec lequel il traite.
Méconnaître ce principe reviendrait à obliger le tiers d'exiger
l’assentiment de tous les cogérants pour chaque acte alors que le législateur a
entendu éviter cet assentiment depuis le début en instaurant la plénitude de
pouvoir pour chaque gérant.
Toutefois, lorsqu’il est établi que les tiers ont eu
connaissance de l’opposition, celle-ci produit ses effets à leur encontre. La
simple connaissance par le tiers de l’existence d’une opposition entraîne l’inopposabilité de l’acte projetée à l’égard de la personne morale. Si le
tiers contractant continue à traiter avec le cogérant, malgré sa connaissance
de l’opposition, il risque de voir l’opération effectuée méconnue par la personne morale. Le tiers dans ce cas doit
s’abstenir de traiter, jusqu’à ce que l’opposition soit levée d’une façon
certaine.
La connaissance par le tiers de l’existence d’une
opposition peut être prouvée par tous moyens et aucune forme particulière n’est
exigée pour établir cette preuve.
La question de la preuve revêt, cependant, une
importance particulière du point de vue de la portée de l’opposition vis-à-vis
des tiers et de la société. Le gérant qui s’oppose a donc, tout
intérêt à faire part sans équivoque au tiers de son opposition en la lui
notifiant par exemple par lettre recommandée avec accusé de réception ou par
exploit d'huissier….
Pour produire ses effets, l’opposition
doit intervenir avant la conclusion de l’acte entre la société et le tiers.
Ainsi, lorsqu’il s’agit d’un contrat de vente, le cogérant doit s’opposer avant
la conclusion de l’acte de vente pour que son opposition produise ses effets et
que la société ne soit pas engagée par l’opération projetée.
En
effet, l’opposition n’a plus de sens si elle est notifiée après la conclusion
de l’acte puisque le tiers n’avait pas eu connaissance de l’opposition au
moment oủ il a finalisé l’opération.
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